Phuket… synonyme de soleil, de vacances sous les tropiques mais aussi de tourisme de masse. Cela faisait donc quelques temps que cette île de la Mer d’Andaman avait cessé de me faire rêver. Connaissant la Thaïlande (presque) comme ma poche, je faisais même partie de ces gens qui évitent soigneusement cette île, réputée comme la Mecque de tous les excès. Le hasard d’un voyage m’y a fait m’arrêter quelques jours. Qu’elle ne fût pas ma surprise de découvrir, qu’à condition de prendre la peine de sortir des sentiers battus, Phuket propose encore quelques coins sympas où la nature a su garder ses droits.
Pour rencontrer la nature et l’authenticité à Phuket, il faut commencer par oublier Patong. A part pour le shopping de fin de séjour, histoire de dépenser ses derniers Bath et de ramener des cadeaux, la ville en elle-même ne présente pas de grand intérêt, sauf évidemment pour les fêtards inconditionnels. Mais même si l’on aime faire la fête non-stop, on ne peut que trouver dommage l’interminable alignement de transats et de parasols sur Patong Beach, plus nombreux que les grains de sable. Et si vous voulez dormir… passer votre chemin, les nuits résonnent des centaines de fêtes dans les bars et boîtes de nuit de la ville. Bref, pas de nature ici… Alors qu’un séjour dans le nord-est de Phuket, du côté de Ao Po Pier, vous permettra de séjourner au calme tout en étant dans un environnement encore préservé. Cette région abrite encore de la mangrove et vos trouverez facilement des pousses de palétuvier jusque sur les plages. Le côté sauvage des plages du nord-est est peut-être pour beaucoup dans la tranquillité de la région. Car ici, pas de sable fin à perte de vue. A la nuit tombée, le sable grouille de crabes et de bernards l’ermite. Le lendemain matin, ce sont coquilles de murex, carapaces de limules (dont certaines très grosses) et autres restes de mollusques et crustacés qui font la joie des curieux. Mais pas des adeptes du grillage recto verso… Une balade dans les bandes étroites de mangrove adjacentes aux plages vos suffira pour vous faire plein de nouveaux amis, à carapaces et à écailles.
La région d’Ao Po est également un excellent point de départ pour aller visiter la baie de Pang Nga. Cette baie d’Halong thaïlandaise beaucoup moins connue que sa grande sœur vietnamienne, mérite 100 fois une petite balade. Toute sorte d’excursions vous sont proposées pour la découvrir, le moyen le plus ludique étant une journée de kayak de mer dans les lagons intérieurs. Car les pitons de sentinelles cachent bien leurs secrets. Certains îlots abritent des lagons intérieurs accessibles uniquement en kayak de mer, seules embarcations capables de traverser les passages caverneux, parfois si bas de plafond qu’il faut s’allonger sur le kayak pour passer. Ces lagons intérieurs ont été découverts dans les années par John Gray, ancien joueur de rugby reconverti en aventurier des mers du Sud. Cette force de la nature a exploré toute la baie à bord de son kayak. Il a d’ailleurs monté la plus connue des entreprises d’excursions de la région qui propose une journée en mer, avec couche de soleil et cérémonie des lampions au cœur des lagons. Cette formule présente l’avantage de vous faire profiter des secrets de la baie en horaire décalée par rapport aux autres excursions. Ce qui vous évitera de vous retrouver à 40 kayaks au même endroit.
Outre les paysages magnifiques et irréels, une balade dans la baie vous permettra l’approche d’une faune et flore unique. Les seuls gros mammifères vivants sur les îlots sont des singes habitués aux passages des touristes sur leurs drôles d’embarcations, il n’est donc pas rare qu’il s’approche pour demander des bananes. Ils nagent relativement bien, même parfois avec leur bébé sur le dos. Les grottes, quant à elles, abritent des hirondelles et des chauves-souris. Gare à la tête ! Ces demoiselles ayant l’habitude de faire leurs besoins sans se soucier de qui passe en-dessous… Pour peu que vous possédiez une lampe de poche, vous pourrez admirer les échafaudages de bambous qui semblent sortis de nulle part, que les ramasseurs de nids d’hirondelles utilisent pour leur collecte. A voir ces morceaux de bambous liés ensemble avec de la corde, qui peuvent monter jusqu’à 5 ou 7 mètres du sol, en équilibre précaire et en appui sur presque rien, on se demande comment les ramasseurs arrivent à ramasser ces nids, dont les chinois raffolent.
Une fois les grottes passées, vous arrivez dans les lagons intérieurs. Et là, selon les cas, vous aurez la vision féerique d’une forêt de palétuvier poussant au milieu de l’eau, les parois rocheuses abruptes couvertes de cocotiers et de palmiers verts fluo, des plantes grasses, ressemblant à des cactus sur les roches les plus proches de l’eau. Et partout les cris des singes qui résonnent sur les falaises. L’histoire ne dit d’ailleurs pas où trouvent-ils de l’eau douce… Sûrement les restes des eaux de pluies prisonnières des marmites de la roche. Ces « lagons », qui au sens propre n’en sont pas, forment abritent un écosystème particulier. Si vous avez la chance d’avoir un bon guide sur votre kayak, il vous montrera sans faute les petits poissons marcheurs endémiques des lieux, qui se font littéralement chauffés le dos au soleil juste au-dessus de la surface de l’eau, sur les branches des palétuviers. Dans certains lagons, l’eau est si peu profonde que l’on doit descendre du kayak pour pouvoir se balader à pied, les pieds dans l’eau et le fond sableux tout doux.
Pas de doute, entre les formations rocheuses qu’on dirait sorties d’un paysage de science-fiction, les animaux, et les plantes, cette journée au cœur de la baie vous en mettra plein les yeux !
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Texte et photos : Heïdi Lafeuil